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Paperjam du 22 février 2020

Le nouvel appétit de l’École d’hôtellerie et de tourisme

par Nicolas Léonard   dans   Paperjam du 22-02-2020

Michel Lanners (ici au centre avec des responsables de RAK Porcelaine) faisait partie de la délégation luxembourgeoise partie voici quelques semaines en mission économique aux Émirats arabes unis.  (Photo: Maison Moderne)

L’École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg jouera un rôle important au sein du pavillon luxembourgeois de l’Exposition universelle de Dubaï. Une reconnaissance pour une institution sur laquelle souffle un vent nouveau depuis quelques années.

La participation de l’École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg à la prochaine Exposition universelle de Dubaï sera un événement majeur pour l’établissement installé à Diekirch. Environ 35 élèves, répartis en trois groupes, se succéderont sur place, encadrés par des professeurs. Ils seront en charge de missions en cuisine, de service au sein du restaurant et de l’accueil des visiteurs. «C’est important pour l’école. Pour le pays également, évidemment, mais aussi et surtout pour ces jeunes, qui vont avoir l’occasion de vivre là une expérience unique», explique le directeur de l’école, Michel Lanners.

Une quarantaine d’élèves sont candidats. Tous âgés de plus de 18 ans, ils seront sélectionnés selon leur assiduité, leur niveau d’anglais et via l’obligation de suivre un cours d’introduction à la culture arabe. «Pour l’école, c’est un vrai challenge. Car ces jeunes viennent de différentes classes et ils doivent aussi pouvoir continuer leurs études. On va donc organiser les cours en fonction, proposer des leçons via e-learning… C’est toute une équipe pédagogique qui se mobilise pour cela», poursuit le directeur. Qui faisait d’ailleurs partie de la délégation luxembourgeoise en mission économique dans les Émirats arabes unis voici quelques semaines. L’occasion de signer pour l’école deux accords de partenariat, avec RAK Porcelaine d’une part et l’Emirates Academy of Hospitality Management d’autre part.

Une nouvelle dynamique

Et qui se mobilise non sans enthousiasme. Il est vrai que depuis quelques années, «on a créé ici, en, équipe, une dynamique vertueuse». Quand il prend ses fonctions voici trois ans, Michel Lanners découvre une école «qui était un peu comme un bateau sans voile au milieu de la tempête». L’équipage est bon, expérimenté, la bonne volonté ne manque pas, mais le cap fait défaut. Ce sera la première tâche de Michel Lanners: définir des objectifs clairs «à une équipe qui était en attente de cela».

Le nouveau directeur, qui se décrit lui-même comme impatient, ne tarde pas à faire souffler un vent de fraîcheur sur une maison qui compte alors presque 60 ans d’existence. Quitte parfois à bousculer l’ordre des choses. Ainsi, à peine en place, il suggère de changer le nom de l’école. «Lycée technique hôtelier Alexis Heck, cela n’exprimait pas la vocation de l’école. Lycée technique? On n’est pas en lycée technique. Hôtelier? On fait bien d’autres choses. Alexis Heck? À l’étranger, et même parfois au Luxembourg, cela ne dit rien à personne. Comment se positionner ainsi? J’ai donc proposé au ministre ‘École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg’, puisque nous sommes le seul établissement public du genre dans le pays», explique le directeur. Un leitmotiv est aussi clairement identifié («Striving for Excellence», soit «susciter l’excellence»). L’offre d’enseignement est complétée par un BTS en «hospitality management et un diplôme de fin d’études secondaires en gestion de l’hospitalité». Des cours de formation professionnelle continue sont offerts et des partenariats avec le secteur privé sont noués (collaborations avec Ferrandi Paris ou avec le chef Alain Ducasse…

En interne, un espace bar-cafétéria est mis en place là où il y avait un gymnase, des produits de qualité comme des couteaux Laguiole sont conçus avec le logo de l’école et exposés dans une vitrine, le réfectoire des élèves est réaménagé grâce au travail des menuisiers de l’école…

Cela bouge, beaucoup et vite. L’équipe de l’école adhère à cette démarche. «Tout le monde a compris que les nombreuses initiatives avaient pour ambition de promouvoir et de valoriser les formations, comme l’offre de formation continue qui s’adresse à un autre public que les élèves, avec d’autres besoins…» L’école ne rate pas non plus le tournant numérique et est une des premières du pays à être équipée à 100% d’iPad. Les cours ont été numérisés, et dans les cuisines, les pâtisseries et les salles de classe traditionnelles, c’est sur écran géant que les élèves suivent l’évolution qui doit être celle de leur recette ou de leurs cours théoriques.

Michel Lanners

«Sans l’appui du ministère, on ne fait rien. »

Michel Lanners,  directeur de l’École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg

On a réussi à faire changer «la perception de l’école. Maintenant, on vise à consolider ces changements», affirme encore Michel Lanners. Voici peu, on venait souvent à Diekirch, car on avait échoué ailleurs ou qu’on ne savait pas très bien quoi faire. «Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration au Luxembourg mérite bien plus que d’être considéré comme une voie de formation pour élèves en échec ailleurs. On joue cartes sur table dès le début. Je dis toujours aux candidats élèves que s’ils viennent avec cet état d’esprit, il risque d’y avoir deux malheureux: eux et moi. Ce qui est important aussi, c’est la relation de partenariat avec les parents. Une école sans dialogue avec eux, cela ne va pas. Les parents sont pour moi des partenaires importants.»

Michel Lanners n’aime pas dire qu’il est l’artisan de ce renouveau, même si c’est en grande partie vrai. «Non, c’est le travail de toute une équipe passionnée et sans cette équipe qui est formidable, je ne fais rien», ajoute-t-il. Et les élèves se mettent au diapason, sans doute conscients de pouvoir se former auprès d’enseignants de premier plan. Un des professeurs de pâtisserie était encore voici deux ans au service de Pierre Hermé, meilleur pâtissier du monde en 2016.

Des inscriptions en hausse

À 60 ans, l’école d’origine privée mais devenue publique, qui accueille 300 élèves, s’offre une nouvelle jeunesse. Les inscriptions en témoignent. Une centaine l’an passé. À ce rythme, l’école sera arrivée aux limites des capacités existantes l’année prochaine. «Ce qui me réjouit beaucoup, c’est qu’on a réussi à réduire sensiblement le ‘drop out’, c’est-à-dire le départ d’élèves en cours d’année. Cet indicateur nous confirme que le changement de perception de l’école a bien eu lieu et qu’une relation de confiance nouvelle entre apprenants, parents et professionnels à l’école peut avoir lieu également», assure encore Michel Lanners.

Une réussite qui est un atout pour l’école dans le cadre de ses demandes auprès du ministère. «Sans l’appui du ministère, on ne fait rien», poursuit le directeur. Or, l’école commence à être à l’étroit. «Oui, ce qui freine le plus, ce sont les infrastructures. Cela nous limite dans notre projet de développement institutionnel. L’école a été prévue pour 250 élèves. Nous devrions pouvoir en accueillir le double.»

L’ambition de faire partie des meilleurs en Europe

Plusieurs projets sont dans les cartons. Le prochain à se concrétiser devrait être un hôtel d’application destiné à la formation des élèves. Le directeur travaille sur les plans avec les architectes.

Michel Lanners en est certain: l’École d’hôtellerie et de tourisme du Luxembourg pourra briller encore plus demain que ce n’est le cas aujourd’hui. Elle a un beau potentiel. «Avec l’adhésion de l’équipe des professionnels de l’école, il est possible de démontrer qu’un établissement public peut faire aussi bien que les meilleures écoles privées de l’hôtellerie et du tourisme. Le Luxembourg a tout pour y arriver, nous avons tout pour y arriver.»

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